Quand acheter son four de poterie ?

Il n’est pas nécessaire d’avoir une longue expérience en céramique pour se rendre compte que le choix d’un four va mobiliser toute notre attention.

Pour choisir un four, il faut savoir quel type de céramique on souhaite produire, car cela va déterminer la température de cuisson de la terre et le choix de l’émail. Comme le travail du potier se précise et se transforme avec l’expérience, il ne faut pas non plus faire un choix trop fermé qui empêcherait toute évolution. Or le four est un achat important, on ne va pas en changer souvent. Voici quelques pistes pour aider à choisir un four au bon moment.  

           
Cuire ses poteries dans le four d’un potier professionnel, est-ce une bonne option ?

Il peut sembler rassurant de commencer sa production en cuisant chez un ami potier. Or le déplacement des pièces dans un autre atelier implique beaucoup de manipulations avec toute la casse inéluctable (emballage, mise en boite, transport de pièces très fragiles car non cuites…) sans compter le temps perdu, l’essence… Quand bien même on émaillerait avec ses propres émaux, le jour où l’on se retrouve enfin à cuire chez soi, il faudra refaire un travail de recherche sur les émaux car il suffit de changer un seul paramètre (et le four est un sacré paramètre…) pour voir ses émaux complètement transformés.           
En clair, quand on monte un atelier, l’achat du four doit se faire dès le début de la production d’autant plus qu’il guide aussi l’agencement de l’atelier.        

  

Tout cela est vrai pour le (futur) professionnel qui s’installe, souvent au terme d’une formation qualifiante au point de commercialiser la production.

C’est un peu différent pour l’amateur surtout s’il est en début d’apprentissage. Cuire chez un professionnel est une bonne chose et procèdera alors d’un complément de formation qui l’aidera à progresser. 


Mais il faut bien avoir à l’esprit que ce n’est pas simple pour un professionnel de cuire les poteries des autres, c’est du temps, et la place que le professionnel réserve à un amateur dans le four se fait au détriment de sa propre production.

Au-delà de ces considérations, le potier prend un vrai risque en cuisant les céramiques des autres. Beaucoup d’amateurs n’ont pas conscience que leurs pièces ne sont pas compatibles avec n’importe quelle cuisson, une pièce en faïence (1150°C) ne peut absolument pas cuire dans un four programmé pour une cuisson de grès (1300°C), la terre ne sera pas simplement surcuite, elle va fondre sur les plaques et les abîmer considérablement, au point de devoir les changer.        

  
Idem avec l’émail. On peut avoir fait un choix de terre compatible avec une cuisson haute température, mais avoir émaillé avec un émail trop fusible. Là encore, la pièce sera probablement perdue mais les plaques aussi. Sans compter que les coulures peuvent tomber sur les plaques du dessous, sur les brûleurs, le fond du four : tout cela n’est pas de la science-fiction mais l’évocation de situations réellement vécues. Un four endommagé, c’est toute une production qui s’arrête.     

  
Il faut donc dialoguer précisément avec le potier, car à tout ce qui a été dit, il convient d’ajouter le gaz dépensé, ainsi que le temps passé. Par ailleurs, il faut aussi se mettre d’accord sur la quantité de pièces et leurs tailles, et au terme du dialogue, proposer au potier une rémunération à la hauteur de son investissement.
Si ces éléments sont respectés, la coopération se passera très bien, et tout le monde en sortira gagnant et heureux.

           
Si j’achète un four de poterie, à quoi dois-je être attentif ?

Dans les fours rapidement disponibles sur le marché (du neuf ou de l’occasion), il y a d’abord le four électrique qui présente un avantage non négligeable, celui de la taille. Il y a de petits fours électriques que l’on peut facilement installer, comme dans un garage déjà existant. Il faudra juste penser à l’alimentation électrique et passer probablement au triphasé. Mais d’emblée, on sait que seules les cuissons en oxydation seront possibles, ce qui peut vite devenir frustrant.

Concernant les fours à gaz, c’est un choix judicieux puisqu’ils permettent à la fois les cuissons en oxydation, et bien sûr les cuissons en réduction. Mais leur installation est plus exigeante que celle d’un four électrique.   
La première taille de four pour cuire à haute température est déjà assez conséquente. Prenons comme exemple la première taille du four Bretagne d’un volume de 170 L. En mesure extérieure, le four fait 1,75 m de hauteur, 1,03 m de largeur et 0,85 m de profondeur. Ce à quoi il faut ajouter l’espace en hauteur pour l’installation de la cheminée et suffisamment d’espace autour (circuler aisément autour du four, ouvrir en grand la porte…)      
Puis il y a l’installation de la cuve à gaz et du raccordement mais pour un petit four de 170 L, on peut se passer de la cuve et faire le choix de 4 bouteilles de propane de 35 kg, installées en série. 

Quant au local lui-même, il faut prévoir un lieu bien ventilé, pour éviter tout problème lié au monoxyde de carbone que ce type de four dégage forcément. La meilleure solution est d’avoir un espace dédié au four, ne serait-ce qu’un cabanon de jardin car celui-ci permet de cuire la porte ouverte.

Ces quelques éléments montrent à quel point le choix d’un four n’est pas simple, et semblent plaider pour en différer l’achat.       

Or, la cuisson est le moment qui va donner tout son sens au travail accompli pendant plusieurs semaines. Le four est le poumon de l’atelier ; ne pas posséder son four rapidement ralentit la production et peut même mettre le potier dans une situation décourageante. 

Au cours de l’installation, il convient donc de prévoir le budget qui permette d’acheter le four rapidement ainsi que de créer l’environnement pour que son utilisation soit la plus aisée possible.


Peut-on installer son four de céramique dans un cabanon au fond de son jardin ?

Il faut veiller à mettre le four le plus près possible de l’atelier pour éviter toute manipulation et déplacements fastidieux car dans le long terme, l’éloignement est problématique.   
Souvent, à l’enfournement, un faux geste fait tomber un peu d’émail et il faut retourner à l’atelier en chercher pour boucher le petit trou. Quand il pleut, c’est pénible de transporter les pièces jusqu’au four et dans ces conditions, le four semble loin…     
Enfin, il y a la surveillance de la cuisson. Si le four est trop loin, on perd trop de temps pendant les cuissons, un four exige une surveillance très régulière, et donc de l’avoir à portée de vue, surtout son régulateur et la flamme de réduction. Et puis pendant les 6 heures de cuisson, on a envie d’avancer le travail plutôt de que de les passer au fond du jardin à surveiller le four…           


Alors, quel four de poterie choisir ?

Evidemment, débourser quelque chose comme 10.000 à 15.000 euro pour monter son atelier semble beaucoup d’argent (et c’est le four qui coûte cher). Dans l’absolu c’est finalement très faible pour lancer une activité professionnelle, et il ne faut pas craindre de prendre ce risque. On se laisse toujours séduire par un four « pas cher » ou « moins cher », et c’est bien normal. Mais attention, les fours à bas prix sont généralement des fours pour la faïence, ils ne dépasseront pas les 1150° C, on risque de vite de le regretter dès que l’on s’attaquera à la fabrication de ses propres émaux. N’oublions pas : qui peut le plus, peut le moins…

Un petit four à gaz pour haute température, avec des bouteilles, est un bon compromis. On veillera à choisir un abri suffisamment grand car, si les ventes se passent bien et que la production augmente, on voudra un plus grand four. L’avantage du petit four à gaz, c’est qu’il est très recherché sur le marché de l’occasion, il se revendra très bien… pour permettre l’achat d’un plus grand four…

Installation de 4 bouteilles de propane alimentant un four Bretagne de 170 litres.

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animé par Matthieu Liévois,
potier-céramiste depuis plus de 40 ans et fondateur de l’école Créamik

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